Enzo, 16 ans, est apprenti maçon à La Ciotat. Son père, qui rêvait pour lui d’études supérieures, le pousse à rester dans un cadre familial confortable mais étouffant. Cherchant sa voie, Enzo découvre un nouvel horizon sur les chantiers, notamment au contact de Vlad, un collègue ukrainien.
Le film explore une multitude de thèmes : la découverte de la sexualité, les rapports de classe, la guerre en Ukraine et le désir d’engagement, que l’on pourrait comparer aux jeunes Français partis faire le djihad en Syrie. Cette ambition narrative, si riche, finit cependant par diluer l’impact global : on aurait sans doute gagné en puissance à concentrer le récit sur une seule de ces thématiques plutôt que de les aborder toutes à la fois.
Le film illustre parfaitement les contradictions de notre époque : pendant que Vlad retourne sur le champ de bataille, Enzo part étudier l’art à New York. Ce contraste frappe et questionne sur ce qui est essentiel, futile ou dérisoire. Sommes-nous trop occupés à planifier nos vacances pour voir les drames se dérouler devant nos yeux ?
La lutte des classes est finement dépeinte : le fossé entre la villa luxueuse et le quotidien du chantier, la piscine à débordement qui symbolise l’opulence, les dialogues ciselés qui mettent en lumière la révolte du fils contre les privilèges familiaux.
Une remarque mérite d’être soulignée : on peut s’étonner qu’en 2025, on continue à sexualiser l’image d’un adolescent de 16 ans. Enzo apparaît constamment torse nu, l’image le rend très attirant et presque idéalisé. Cette représentation interroge sur notre regard collectif et sur ce que le cinéma continue de véhiculer. Toutefois, le film préserve une certaine éthique grâce à l’attitude exemplaire de Vlad, qui repousse les avances du jeune homme sans ambiguïté. Les codes post-MeToo sont ici pleinement respectés, offrant un contrepoint intelligent à cette tension.
Coécrit par Laurent Cantet (Entre les murs), Robin Campillo (120 battements par minute) et Gilles Marchand (Dans la forêt), le film porte la marque d’un scénario exigeant. Initialement prévu pour être réalisé par Cantet, décédé en 2024, Enzo a finalement été mis en scène par son ami et collaborateur de longue date Robin Campillo. D’où la mention « un film de Laurent Cantet, réalisé par Robin Campillo » sur les affiches.
Un film qui interroge nos priorités, nos engagements, et la complexité d’un passage à l’âge adulte dans un monde profondément fracturé — tout en questionnant aussi subtilement notre rapport à la représentation des corps.
Fiche technique :
Titre : Enzo
Un film de : Laurent Cantet
Réalisation : Robin Campillo
Avec : Eloy Pohu, Pierfrancesco Favino, Elodie Bouchez, Maksym Slivinskyi
Pays : France
Genre : Drame
Date de sortie : 18 juin 2025 (France) – 2 juillet 2025 (Belgique)
Durée : 1h42
Sélection : Quinzaine des Cinéastes – Festival de Cannes 2025
