CINEMA : « La Bonne Étoile » de Pascal Elbé

France, 1940. Jean Chevalin, ancien soldat en désertion, tente de survivre avec sa famille dans une misère étouffante. Convaincu que certains bénéficient de passe-droits, il imagine une idée pour le moins improbable : se faire passer pour juif afin de profiter de l’aide des passeurs et rejoindre la zone libre. Ce point de départ, à la fois cocasse et dérangeant, devient le fil rouge d’un récit où les certitudes de Chevalin vont peu à peu s’effriter.

Pascal Elbé choisit un ton inattendu pour traiter cette période : une entrée de comédie presque burlesque, qui évoque Claude Zidi, avant de basculer vers un malaise plus profond. Car derrière les quiproquos et les situations absurdes se dessine une peinture amère du racisme ordinaire dans la France occupée. Le film interroge surtout le rôle des citoyens, ces Français et Françaises qui, parfois avec un zèle glaçant, participaient aux dénonciations et aux rafles, souvent avec plus d’ardeur encore que l’occupant.

C’est là que réside la puissance du film : non pas tant dans la grande histoire, mais dans la mise en lumière de ces mécanismes collectifs qui transforment la peur et les préjugés en armes redoutables. À travers des dialogues simples, parfois crus, Pascal Elbé pointe la facilité avec laquelle une société peut basculer dans la compromission et l’indifférence.

Difficile, en sortant de la salle, de ne pas faire le lien avec notre époque. Dans plusieurs démocraties, la montée des populismes, la banalisation des discours de rejet ou encore l’implication de simples citoyens dans l’application de politiques migratoires rappellent que l’histoire se répète, sous d’autres formes. Le film agit comme un miroir tendu au spectateur, l’invitant à réfléchir sur le rôle de chacun dans la préservation ou l’effritement de nos valeurs.

Enfin, voir un film sur la Seconde Guerre mondiale aujourd’hui n’a pas le même retentissement qu’il y a vingt ou trente ans. Les images de conflits contemporains, les drames d’exode et les violences contre des populations civiles nourrissent notre compassion autrement, la complexifient, et parfois même la bousculent. C’est cette tension, entre mémoire et actualité, que le film active avec intelligence et gravité.

Avec ce projet, Pascal Elbé signe un film nécessaire. Derrière l’humour initial et les péripéties presque loufoques, se cache un récit politique au sens noble, qui résonne longtemps après le générique.

Fiche technique :
Titre : La bonne étoile
Réalisation : Pascal Elbé
Avec : Benoît Poelvoorde, Audrey Lamy, Zabou Breitman, Pascal Elbé, Hugo Becker
Pays : France
Genre : Comédie dramatique
Date de sortie : 12 novembre 2025 (Belgique – France)
Durée : 1h40

Affiche de « La Bonne Étoile » de Pascal Elbé

3 réflexions sur “CINEMA : « La Bonne Étoile » de Pascal Elbé

  1. Pour être franc, je reviens à peine du cinéma et à lire certains avis de spectateurs, je me demande si nous avons vu le même film où si la production s’est offert quelques faux articles, histoire d’ amortir l’accident industriel qui se profile.
    Tout est loupé, approximatif et flou dans cette heure quarante de film.
    Il n’y a que Zabou Breitman pour tenir à peu près le cap, mais ça ne suffit pas pour éviter le naufrage.
    Navrant, gênant, mal écrit et à la limite du foutage de gueule, ce scénario ne semble pas avoir où il souhaite nous emmener. Comédie, drame, fable ? En tout cas, un vrai nanar qui n’a fait rire personne dans la salle où j’ai eu la malchance de me trouver.

    1. Entièrement d’accord…
      Pas fin.
      Gênant est sûrement l’adjectif le mieux approprié.
      L’idée de se faire passer pour des juifs en 39-45 pour mieux manger est simplement révoltante et insultante pour ceux qui ont traversé cette période.
      J’étais à l’avant première du film .
      On vient pour voir le réalisateur.
      Il a débarqué en mangeant derrière des lunettes de soleil dans une salle obscure de cinéma et fut rappelé à l’ordre avec force gestes pour conclure le débat par quelques bobos qui nous regardaient comme des singes pendant son discours mille fois répété depuis.

  2. Quel beau moment! très joliment raconté, Benoit toujours excellent. Ce film fait du bien. Je ne pouvais plus regarder cette période au vu de l’histoire actuelle. La légèreté du film, présentant pourtant la réalité, m’a redonné confiance. J’en parle!!!!

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